Sur ce daguerréotype pris en 1842 à Paris, Eynard et son épouse posent en compagnie du général grec Jean Colettis (1774-1847), ainsi que de deux neveux et d’une nièce d’Anna, Henri Bouthillier de Beaumont, Charles de Traz et Marie de Regny. Ils sont assis devant la façade côté jardin de leur hôtel particulier, reconnaissable à ses persiennes fermées. Le général Colettis, en position presque centrale, porte le costume traditionnel grec, avec une fustanelle (jupe en coton blanc plissé), une veste fourrée, une large ceinture en tissu et un imposant fez (couvre-chef masculin tronconique orné d’un gland noir). Relevons que Charles de Traz, assis tout à droite, est également coiffé d’un fez, mais plus petit. Héros de la guerre d’indépendance grecque, Colettis avait été nommé ministre de la Défense par le comte Jean Capodistria, grand ami d'Eynard assassiné en 1831. De 1835 à 1844, il est ambassadeur de Grèce à Paris, où il se lie d’amitié avec le ministre François Guizot. À la suite du coup d’Etat du 3 septembre 1843, il repart pour la Grèce et participe à la rédaction de la nouvelle constitution avant de devenir premier ministre du roi Othon Ier. L’air fier et extrêmement sérieux de Jean Colettis, dont la haute stature domine la composition, tranche avec l’expression des personnages disposés autour de lui. Entre les regards et les attitudes se crée une sorte de jeu qui anime la composition et lui confère de l’originalité. Eynard, assis de profil, les jambes et les mains croisées, regarde le général qui semble le toiser. Anna en revanche, une main appuyée contre son visage penché de côté, n’accorde aucune attention à son imposant voisin. De face, contrairement à son habitude, elle fixe l’objectif sans grande expressivité. Elle porte un bonnet de lingerie, une ferronnière et un manteau d’intérieur ceinturé d’un long cordonnet de passementerie qui retombe sur le devant de sa robe claire. Pendant d’Eynard à droite du général, Charles de Traz regarde devant lui, assis de trois quarts sur un siège pliant, ses mains croisées soutenant l’un de ses genoux. Au deuxième rang, son cousin par alliance Henri Bouthillier de Beaumont est placé entre Anna et le général, qu’il regarde avec un léger sourire en apparence admiratif. Marie de Regny, à droite de Colettis, demeure au contraire impassible, le visage incliné légèrement vers l’avant. Deux autres daguerréotypes ont certainement été pris le même jour, en l’absence de Jean Colettis, comme le donnent à penser plusieurs protagonistes vêtus à l’identique (2013 001 dag 009 et daval 01). A l’instar d’autres œuvres relativement précoces d’Eynard, l’image, recouverte d’un voile, n’est pas de très bonne qualité ; lui-même est un peu flou, ainsi que les plantes placées tout à droite, et de petites taches blanches parsèment le verre. (I. Roland)
inscription sur l'oeuvre
la pièce a probablement été reéencadrée