Sur ce daguerréotype non daté, Jean-Gabriel Eynard s’est représenté assis entre deux de ses petits-enfants. Cette plaque peut être située en 1845 par comparaison avec une autre (DE 033) datée au verso du 10 octobre 1846. Ici, les enfants semblent légèrement plus jeunes. Gabriel et Hilda pourraient avoir respectivement onze et dix ans.
La spontanéité des attitudes montre les liens étroits qui unissent les protagonistes : Jean-Gabriel Eynard tient par la taille le garçon, qui a passé son bras sur les épaules de son grand-père, dans un geste affectueux. Telle une petite maman portant son enfant sur les genoux, Hilda Eynard pose avec son élégante poupée aux côtés de son grand-père, ce qui confère une émotion particulière à la scène. Son frère Gabriel tient à la main un cerceau et une baguette, jeu très populaire en Suisse au 19e siècle. Les trois personnages sont placés sur un même plan devant la porte-fenêtre, dans un cadrage très serré et rapproché. Ils ont tous trois le regard tourné vers la gauche, en direction d’une action qui se situe hors champ.
Comme pour souligner le lien qui les unit, Eynard soigne le détail jusque dans le choix des vêtements : son gilet à carreaux fait écho à la tunique quadrillée de Gabriel et à la robe à carreaux d’Hilda, dont les teintes claires, propres aux vêtements que l’on porte l’après-midi, indiquent une saison estivale.
Le croisement très recherché des jambes très longues d’Eynard se retrouve sur d’autres daguerréotypes (rm 18 et 2013 001 dag 034). Les premiers traités de photographie préconisent d’adopter pour le portrait « une pose non seulement heureuse et naturelle, mais encore de choisir celle qui lui est la plus favorable » (Lerebours 1843, p.74). Pour les portraits sur une plaque au format un sixième et à très court foyer, il est également conseillé de bien positionner les jambes et les mains afin qu’elles se trouvent sur un même plan. Pour ce portrait familial, en l’occurrence sur un quart de plaque, Eynard adopte sans doute une position lui permettant de ramener ses jambes près du corps pour éviter une aberration optique qui pourrait provoquer une disproportion des membres dans un plan rapproché (Lerebours 1843, p. 74). (U. Baume-Cousam)
Inscription posthume : Oui